Grande première en France : un tribunal vient de condamner Airbnb à verser plus de 8 000 euros à un propriétaire dont le logement avait été sous-loué illégalement sur la plateforme. Un homme louait un appartement 822 euros par mois, à Paris, dans le quartier du Bon Marché : entre le 31 mars 2016 et le 24 septembre 2017, il l’a sous loué 119 fois, sans l’accord du propriétaire, pour une durée de 369 jours et une somme totale dépassant les 49 000 euros – un type de sous-location parfaitement illégal ! L’avocat du propriétaire a pu obtenir, conformément à la loi, les relevés de transaction d’Airbnb, qui prouvaient les sommes encaissées par le locataire.
Lors du procès, le Tribunal d’Instance de Paris a déclaré le locataire coupable de sous-location illégale ; étant insolvable, il n’a pas pu rembourser les sommes indûment gagnées. Mais il a dû quitter l’appartement qu’il occupait.
Mais, plus intéressant, le Tribunal a également décidé de condamner Airbnb Ireland, pour négligence, en vertu de l’article 1241 du Code Civil. La juridiction a estimé qu’Airbnb avait laissé le locataire dépasser la durée légale des 120 jours annuels de location Airbnb, et que la plateforme n’avait pas vérifié auprès du contrevenant qu’il avait l’autorisation de sous-louer. En clair, Airbnb avait les moyens de savoir que la location était illégale, et la plateforme n’a rien fait. «La société a manqué à ses obligations légales et doit être tenue pour responsable de ses manquements», déclare le tribunal dans son jugement.
C’est une première : habituellement les tribunaux, dans des affaires similaires, ne condamnaient que les locataires ; cette fois Airbnb a été jugé responsable d’avoir laissé l’annonce en ligne. Le Tribunal s’est appuyé sur cet article du Code du Tourisme : «une plateforme destinée à la mise en location de logement informe le loueur des obligations de déclaration ou d’autorisation préalables et obtient de lui, préalablement à la location du bien, une déclaration sur l’honneur attestant du respect de ces obligations».
Dès lors, le Tribunal a demandé à Airbnb de rembourser au propriétaire les commissions qu’elle a touché sur la location, soit 1 869,07 euros, auxquels s’ajoutent 3 000 euros de préjudice moral, 1 664,86 euros de préjudice matériel et 1 500 euros de frais d’avocat. Soit un total de 8 000 euros.
Cette somme ne va pas remettre en cause la pérennité financière de la multinationale, mais cette condamnation est capitale dans la jurisprudence qu’elle peut provoquer : si le jugement est confirmé, tous les propriétaires dont l’appartement a été sous-loué illégalement depuis 2013 pourront se retourner vers Airbnb ! Le temps d’une lucrative illégalité semble bien révolu pour Airbnb !
Ils en parlent aussi : Les Echos, Le Monde, Challenges, 20 minutes, Ouest France