Beaucoup moins sympathique que le double effet Kiss Cool (si vous êtes nés après 1990, la référence risque de vous échapper), le « double effet Amazon-Airbnb » est en train de vider des quartiers entiers de Paris de leurs commerçants de proximité, avec de terribles conséquences sur le quotidien des habitants.
Jean-Louis Missika, adjoint à l’urbanisme à la mairie de Paris, détaille cet « effet de tenaille » : la concurrence des sites de vente sur Internet, Amazon en tête, fait baisser l’activité des petits commerçants ; les locations de type Airbnb s’avèrent tellement rentables que les propriétaires de fonds de commerce ou les investisseurs sont fortement tenté de transformer des boutiques en locations saisonnières.
Des locaux commerciaux, boutiques ou espaces de stockage, deviennent alors des locations Airbnb. Un phénomène qui prend chaque jour plus d’ampleur. Empêchant de nouveaux commerçants de s’installer, vidant les quartiers de leurs commerces de proximité : « Depuis un peu moins d’un an, on commence vraiment à le sentir. On voit des artisans, comme des bouchers ou des boulangers, qui ne peuvent plus s’installer. C’est le cas en particulier dans les zones tendues habituelles, comme certains endroits des 11e et 18e arrondissements et surtout dans le centre de Paris », détaille Olivia Polski, adjointe au commerce.
Les conséquences sont graves : « L’artisanat est le premier employeur de France. Mais il ne s’agit pas juste de l’activité économique. Cela a des conséquences sur les villes, sur la population, le paysage urbain, le lien social. Le jour où il n’y aura plus de commerces, les rues seront différentes », s’inquiète Olivia Polski.
Le pire, c’est que cette pratique est parfaitement légale. Pour le Plan Local d’Urbanisme de la ville de Paris, un commerce et une location saisonnière appartiennent à la même catégorie dite «activité économique». Les nouvelles locations ne sont donc même pas soumises à la limite des 120 jours par an, les rendant encore plus attrayantes.
Avec, déjà, de nombreuses dérives : « Il n’y a absolument aucune règle. On commence à assister à des choses de plus en plus scandaleuses, comme des ‘dortoirs à touristes coréens’, où 30 personnes sont entassées dans un local sur des lits superposés », déplore Jean-Louis Missika.
« Il ne s’agit même pas d’un problème de nombre de contrôleurs de la ville de Paris, car les personnes ne sont pas en infraction. C’est que nous n’avons pas la possibilité légale de lutter. Les seules solutions consistent donc à modifier le PLU, ce qui prend plusieurs années, ou bien à vite changer le cadre juridique », pointe Ian Brossat, adjoint au logement.