Airbnb et Century 21 viennent de signer un accord pour faciliter la sous-location de logements gérés par l’agence immobilière à Paris : derrière un discours de retour à l’esprit collaboratif, la plateforme détourne encore l’esprit de la législation française à son profit et au détriment de la vie locale.
Baptisé Bail Century 21 Airbnb-Compatible, l’offre sera expérimentée dans les quatre premiers arrondissements de la capitale (ceux qui souffrent le plus des effets d’Airbnb sur l’immobilier). Le principe : si le propriétaire donne son accord, le logement peut être sous-loué sur Airbnb : « Dès que le propriétaire a donné son accord, tout est ensuite géré par un professionnel de confiance. C’est l’agence qui se charge de la mise en ligne de l’annonce sur le site de Airbnb et de toutes démarches administratives applicables » expose le communiqué de présentation.
Par la suite, c’est le locataire qui gère l’annonce sur Airbnb, prix, accueil des visiteurs, ménage… Les gains sont ensuite partagés ainsi : 70 % pour le locataire, 23 % pour le propriétaire et enfin 7 % pour l’agence Century 21 (Airbnb conservant, bien évidemment, sa commission auprès du loueur et du voyageur). Les conditions de location restent limités par la législation actuelle (pas plus de 120 jours par an notamment). La plateforme met en avant le fait que cette offre est un retour aux principes collaboratifs d’Airbnb, puisque tout le monde est gagnant dans cette affaire.
C’est oublier un peu vite que la sous-location n’est pas illégale en France : elle nécessite simplement l’accord du propriétaire. Si le propriétaire donne son accord, un locataire peut sous-louer son logement, mais dans un cadre précis (le loyer ne peut notamment pas dépasser celui que verse le locataire à son propriétaire). La formule proposée par Airbnb fait exploser ce cadre, surtout dans les quatre premiers arrondissements de Paris, où les tarifs Airbnb sont de deux à cinq fois plus élevés qu’un loyer moyen !
L’autorisation réglementée de la sous-location donne une souplesse à un locataire s’entendant bien avec son propriétaire et souhaitant quitter son logement pendant un temps donné sans perdre d’argent (mais sans en gagner). La formule proposée par Airbnb va éveiller l’appât du gain de toutes les parties (locataire, propriétaire, agence), ce qui incitera fortement les locataires à quitter régulièrement leurs logements, et videra encore un peu plus ces quartiers de leur âme, tout en augmentant les nuisances provoquées par les touristes…
Car, il ne faut pas rêver : si la sous-location réglementée privilégie, de fait, les personnes venant vivre, travailler ou étudier un temps donné dans une ville, le sous-location Airbnb-Century 21 ne s’adressera qu’à des touristes… Ainsi chacun gagnera plus d’argent, Airbnb y compris, et la vie locale s’évanouira un peu plus de l’hyper-centre de Paris…