Le double discours d’Airbnb se poursuit : faisant publiquement mine d’accepter la législation française et montrant patte blanche avec un système d’auto-régulation, la plateforme attaque les lois françaises comme anticonstitutionnelles, au grand désarroi de la ville de Paris, qui dénonce « des couteaux plantés dans le dos ! »
En effet, le 12 juin, Airbnb a soulevé deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) auprès du tribunal de grande instance de Paris. Ces dernières attaquent deux lois régulant l’activité de la plateforme, pour « violation du droit de propriété » et « violation du principe d’égalité devant les charges publiques ». La première est la loi Allur de 2014, qui consacrait la limite des 120 jours de location par an en meublé touristique, la seconde la loi pour une République numérique de 2016, qui permet aux villes de rendre l’enregistrement en mairie obligatoire pour louer sur Airbnb. L’avocat d’Airbnb affirme que ces textes, intégrés au Code du tourisme, n’ont « jamais été déclaré[s] conforme[s] à la Constitution par le Conseil constitutionnel ».
Ian Brossat, adjoint d’Anne Hidalgo chargé du logement à Paris, dénonce un « double discours manifeste d’Airbnb », une « attitude totalement hypocrite qui consiste à faire des grands sourires avant de planter des couteaux dans le dos ». En effet, début juin, Airbnb avait accepté de mettre en place une limitation automatique à 120 jours par an pour ses annonces déposées en France : « Ils s’engagent à respecter la loi avec deux ans de retard. Mais, en catimini, ils essaient de ruiner notre dispositif qui s’appuie sur cette même loi. Airbnb, en réalité, c’est 100 % business et 0 % responsabilité » attaque l’adjoint.
Rappelons qu’Airbnb a également attaqué la législation de la ville de Paris, ainsi que celles de Barcelone, Berlin et Bruxelles, devant la Cour de Justice européenne, en s’appuyant sur un lobbying intense. Début juillet, douze villes, dont Paris, se sont présentées devant la Commission pour plaider leur cause.
Sur le plan judiciaire, les procès contre les propriétaires et locataires louant illégalement sur Airbnb à Paris se poursuivent : le premier semestre 2018 a vu 89 amendes infligées par le TGI de Paris et la Cour d’appel, pour un total d’un million d’euros (contre un record de 1,3 millions d’euros sur toute l’année 2017).