Désertification des villes, baisse du chiffre d’affaires pour les petits commerces, fermeture de certaines classes de maternelle et de primaire, migration des individus en banlieue, augmentation drastique de la pollution, sont autant d’exemples des dérives occasionnées par le développement de la plateforme communautaire.
Et pour cause, avec 70 000 logements proposés par Airbnb rien que dans la capitale, les conséquences sont palpables au sein de la Ville Lumière, « dont l’âme et l’économie sont désormais en danger », relève le Journal du Net.
Le média s’inquiète en effet que des quartiers comme le Marais ou l’Île Saint-Louis deviennent de vraies cités dortoirs » en raison d’une pression immobilière trop lourde, poussant les propriétaires à réserver tout ou partie des immeubles aux méandres de l’uberisation touristique. C’est donc tout le microcosme local qui est directement impacté, puisque « le tissu humain, social et économique des résidents ne peut pas être remplacé par des voyageurs de passage. »
Certains commerces peinent ainsi à survivre, à l’image des enseignes travaillant main dans la main avec les hôtels. C’est le cas de l’avenue Montaigne ou la rue du Faubourg Saint-Honoré, poursuit le média, où les boutiques concernées accusent une baisse de chiffre d’affaires de l’ordre de 40% tant la métamorphose opérée par la firme californienne impacte l’activité touristique « dite classique ».
L’année 2016 a d’ailleurs été particulièrement désastreuse sur ce dossier, avec une baisse de fréquentation des établissements hôteliers franciliens de l’ordre de 12,7% si l’on compare les crus d’août 2015 et 2016. Certes la menace terroriste est passée par là, mais elle seule ne suffit pas à expliquer cet état de fait.
Toutefois, d’autres effets plus inattendus sont également constatés, à l’image de plusieurs fermetures de classes de maternelle ou de primaire dans certains quartiers, faute d’effectifs suffisants en termes d’élèves.
Entre 2012 et 2016, Airbnb est passé de 194 000 voyageurs à 2 millions
Source : Airbnb
Un axe centre-ville-banlieue de plus en plus prégnant
On assiste donc à une désertification pure et simple du centre-ville parisien, statistiques à l’appui. Les derniers chiffres publiés par l’Insee sont même saisissants « car après avoir augmenté de manière continue depuis 1999 (+ 0,5% par an, au même rythme qu’au niveau national), la population de la capitale enregistre un recul inédit qui se concentre très nettement dans les arrondissements centraux : – 5% dans les 2e, 4e et 8e entre 2009 et 2014 ; – 4,25% dans le 1er ; – 3% dans les 3e et 7e… »
Mais ce n’est pas tout, puisque « l’Ile-de-France a gagné 300 000 habitants en cinq ans, Paris étant la seule commune de la région à en avoir perdu dans le même temps (- 14 000), ce qui ramène son effectif intra-muros à 2,22 millions ».
De ce fait, « là où la population baisse, le nombre de résidences secondaires et de meublés touristiques augmente. Ces logements représentent désormais plus de 17% des appartements dans le 1er arrondissement (contre 15% en 2008) et plus de 20% dans le 4e (18% en 2008). Et si l’on y ajoute les logements vacants, on atteint même 30% dans certains secteurs, notamment dans les 1er, 4e, 6e et 8e arrondissements », confirme l’Institut.
Une relation de cause à effet « made in Airbnb » que le directeur de l’Insee constate allègrement auprès de nos confères de Télérama : « Les communes limitrophes situées dans la première couronne regagnent en conséquence de la population à cause de la cherté du logement dans le centre de Paris, et cette cherté s’explique par la raréfaction du nombre de logements destinés à devenir des résidences principales ».
Effet domino, la pollution s’envole
Cette migration vers la banlieue occasionne par la force des choses un engorgement routier mais aussi une fréquentation accrue des transports communs – cette population continuant de travailler à Paris même. La pollution explose irrémédiablement.
Et pour cause, à l’heure où l’économie verte se mue en « Marianne de l’écologie », plusieurs situations démontrent que ce modèle trouve très vite des limites contradictoires sur cet aspect.
Début 2017, une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) a en effet apporté un sérieux bémol aux bienfaits de l’économie collaborative. Si, à première vue, les conséquences demeurent vertueuses, d’autres éléments viennent pourtant ternir ce tableau écolo.
Concrètement, l’économie collaborative ne rend service à l’environnement que sous certaines conditions. C’est le cas par exemple du covoiturage insiste la structure : « Si les trajets courts ne présentent pas de nuisances environnementales, puisque dans 80% des cas, les personnes transportées auraient utilisé un autre véhicule particulier, et dans 20% les transports publics, les déplacements plus longs posent eux problème ».
Et c’est peu de le dire, car dans cette configuration, « l’avantage environnemental est moins clair car sans covoiturage, peu de passagers auraient sorti leur propre véhicule, 12% d’entre eux n’auraient même pas voyagé, tandis que 63% auraient pris le train ».
Les cas de ce type sont légion affirment les analystes de l’ADEME, confirmant que ce postulat s’applique également sur les jardins ouvriers, les vide-greniers ou encore les plateformes dématérialisées.
Le cas de Airbnb occupe d’ailleurs une place toute singulière au sein de l’argumentaire : les touristes utilisant le site décident de surcroît de voyager plus loin en raison de « la ristourne hôtelière » accordée par la plateforme, ce qui provoque fatalement, une émission de CO2 bien plus importante qu’il n’y paraît.
Une telle mutation est ainsi fatalement soumise à un effet « rebond », correspondant à un surplus d’activité contre-productif pour l’environnement.