Airbnb est désigné comme l’un des grands responsables du ras-le-bol contre le tourisme de masse : en effet, dans des villes comme Venise ou Barcelone, le trop-plein de touristes a vidé certains quartiers de leurs habitants et a changé profondément la vie de quartier, désormais tout entière dédiée aux touristes. « Il finit par y avoir une rupture d’équilibre entre la vie quotidienne des habitants et une activité touristique qui génère trop de nuisances, avec des gens qui viennent avant tout pour faire la fête sans respect des populations locales », relève Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme. A Venise, Dubrovnik, Majorque, Ibiza Gerone ou Barcelone, les habitants restants expriment de plus en plus violemment leur exaspération de vivre dans des « usines à touristes » : manifestations, dégradations de locations saisonnières, intimidation…
En la matière, Airbnb a une grande responsabilité : les propriétaires qui préfèrent louer sur la plateforme qu’à des habitants à l’année renforcent largement cette confiscation de certains quartiers par l’offre touristique. Airbnb provoque une explosion des loyers, qui évincent de certains quartiers non seulement les classes populaires mais aussi les classes moyennes. « On va avoir une démultiplication dans ces zones si les pouvoirs publics ne prennent pas des mesures de régulation des logements saisonniers », estime Didier Arino. Certains experts proposent la mise en place de quotas de touristes, d’autres un encadrement beaucoup plus strict des offres de type Airbnb, avant qu’il ne soit trop tard.
Car le tourisme de masse qu’encourage trop largement Airbnb provoque « des effets extrêmement clivants sur la population locale: d’un côté des gens s’enrichissent, et de l’autre des gens subissent, sont prolétarisés et marginalisés », affirme l’anthropologue Jean-Didier Urbain.
Le plus ironique est qu’Airbnb et les autres acteurs de ce tourisme de masse sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis : « en l’état, on observe que, d’une certaine manière, le tourisme est en passe de s’autodétruire », détaille l’anthropologue Saskia Cousin. Par exemple, « dans certaines stations, les saisonniers ne peuvent plus se loger puisque toutes les chambres sont louées à des vacanciers ».